Alors que Bata a quitté la Suisse en fermant ses 29 succursales et vendu également ses 136 magasins en France en 2016… Et que Vogële, est prêt à être racheté par un groupe Italien… Le net à l’origine de ces déboires met carrément la pression sur les distributeurs et détaillants. S’agit-il d’un épiphénomène ou d’une tendance à présent durable et solide? Et peut-on dire que cette tendance ne touchera que la mode, le voyage, le loisir et les produits blancs et bruns?  La distribution de produits alimentaire est-elle à l’abri de cette vague déferlante?

La réponse est plutôt non! Différentes nouveautés apportent des sueurs froides aux distributeurs de produits alimentaires, comme cela avait été le cas entre 2004 et 2010 avec la marée des hard-discounters.

Commençons par le drive. Ce service client s’est développé de manière inégale en Europe avec la Grande-Bretagne, la France et les Pays-Bas comme principaux acteurs de ce service, représentant tout de même une part de 4% de chiffre d’affaires. Alors que d’autres pays sont à la traine avec à peine 1% de chiffres d’affaires comme la Suisse. Il s’agit effectivement, non de drive, mais de livraisons à domicile ou des points de retrait (pick-up). Un tel service payant, ne séduit donc pas le consommateur. Actuellement, le Shop (enseigne Migros), service de commande en ligne, développe son réseau selon le modèle du drive. Le client vient chercher son produit dans un magasin désigné. Nous sommes dans du cross-canal le plus typique.

Mais quelle tendance donner à la commande en ligne et de réceptionner ses commissions toutes prêtes en magasin?

Des prévisions européennes avancent un chiffre d’affaires de 7% d’ici 2018, pour les pays déjà bien avancés dans l’utilisation du drive ou point relais. Cette évolution donne le tournis! Faut-il s’en plaindre, s’en réjouir? Ni l’un, ni l’autre mais demeurer pragmatique. S’opposer ou ne pas anticiper ce mouvement serait fossiliser l’enseigne, et la rendre vulnérable.

En effet, l’utilisation du net pour faire ses emplettes dépend des avancées techniques, certes, mais aussi de la catégorie socio-professionnelle, et du taux d’équipement en smartphones et tablettes. Un élément et non des moindres, l’âge! En 2020, le marché du travail sera déjà largement occupé par la génération Y, celle qui est hyper connectée! Des clients plus connectés, jeunes et avec une culture alimentaire faible à conquérir et fidéliser!

Et que faire face à l’e-Food? Mélange de différentes offres de produits, de plats prêt à consommer à commander sur le net et livrés chez vous… jouant la carte du frais et du local très souvent.

Un autre phénomène auquel doit se préparer les distributeurs de denrées alimentaires passe par les objets connectés. Samsung en mai 2016 a présenté son frigo connecté, avec prise de photos des produits restants actualisée à chaque ouverture de porte, enregistrement des dates de péremption  sur le smartphone. Il y a même la possibilité de consulter des recettes et de faire des paiements en lignes de denrées commandées depuis l’écran du réfrigérateur! Le prix d’un tel appareil est dissuasif, mais d’ici quelques années, le taux de pénétration sera important. Avec en plus Amazon qui se lance aussi dans la distribution de denrées alimentaires, certes essentiellement de l’épicerie et des boissons, mais rien n’empêche que demain votre réfrigérateur soit intelligent, géré par un site marchand!

Le magasin de demain doit tenir compte aujourd’hui de ces tendances fortes et se transformer en réduisant certainement sa surface de vente et en investissant dans les technologies favorisant le cross canal, mais aussi le confort d’achat du client. D’ailleurs, ces changements se feront pour et à travers le client. L’autre carte à jouer est d’être capable de créer l’évènement autour du client. Investir dans le personnel de vente! Dans ce sens, le vendeur de produits alimentaires devra être mieux formé à la connaissance des produits et à la technique de vente! Il sera la clé du succès à travers la vente « évènementielle ».

Gérald Dehan

Coach et consultant